« Mon fils... Un danseur... Mais on aura tout vu ! Tu vas nous ramener un garçon à la maison après ? Où on va comme ça ?! » Le père de famille tapa du poing sur la table. Le ton était monté lorsque, au cours du dîner, Hugo avait annoncé à son père qu'il pratiquait la danse depuis un bon moment déjà. Le secret avait été de plus en plus lourd à porter, le jeune homme fatiguant sous le poids des mensonges à répétition. Alors ce soir, cette révélation avait animer le repas, plus que de raison. « N'importe quoi ! » - venait de répliquer Hugo, sèchement. Son père déraillait, ayant probablement peur de ce qu'il ne connaissait pas, d'un milieu qui lui était inconnu en tant qu'homme. « Et ne me répond pas ! Tu n'es qu'un menteur, un traître, un moins que rien ! » Les mots dépassaient la pensée de Mr. Sandler. Il ne parvenait pas à les retenir, profondément déçu par le comportement de son fils. Sa confiance avait été mis à rude épreuve ce soir. Il en devenait blessant envers son fils... « Chéri ! »  « Toi, ne la ramène pas ! » Si la mère s'en mêlait, cela allait vraiment dégénérer. Voulant protéger son enfant, elle était intervenue. Malgré tout, elle tenait très souvent le rôle de ''tampon'', limitant la casse lors des conflits familiaux. Pour ne pas envenimer la situation, elle opta pour le silence, obéissant donc à son époux. Mais se laisser faire n'était pas dans les plans d'Hugo, loin de là. Le ras-le-bol se faisait sentir, il craquait et libérait ce qu'il ressentait au plus profond de lui. « T'es bourré de préjugés papa ! Ce n'est pas parce que je danse que je suis gay ! Et de toute façon, si je l'étais, qu'est-ce que ça ferait hein ?! » Un silence plongea tout le monde dans un étrange malaise. Kenzo, qui jusqu'à présent n'avait rien dit, observait tout le monde. Il avait horreur de ces disputes, et celle-ci était sans doute la plus impressionnante à laquelle il avait assisté. Il ne se sentait pas bien et espérait que tout cela se finisse très rapidement, avec dans un idéal incertain des explications plus posées et des excuses. Utopie ! « ...Tu ne serais pas mon fils. » -lâcha froidement Mr. Sandler. Hugo fixa son père, sans un mot. La famille venait d'être soufflée par ces mots si durs. L'aîné quitta la table et Kenzo ne tarda pas à en faire de même. Plus tard dans la soirée, la porte d'entrée claqua violemment. Hugo était parti.


« Pourquoi est-il mauvais comme ça, papa ? » La question de question avait été si spontanée qu'elle avait décontenancé sa mère. Elle le fixait, prise au dépourvu. Que pouvait-elle répondre à son fils, adolescent pris au piège d'une famille qui se déchirait ? Elle n'en savait trop rien. Mais il fallait bien lui fournir des explications et répondre à ses interrogations. Il n'avait rien demandé à personne lui... « Il a reçu cette éducation mon chéri... Il ne pense pas mal faire et veut vous protéger. » C'est tout ce qu'elle avait trouvé. Et même si cela sonnait juste, elle doutait que cela soit suffisant pour excuser l'attitude de son mari envers ses fils. Renier son garçon à cause d'un sport lui paraissait si extrême... Les passions n'étaient-elles pas faite pour rassembler les gens et permettre un partage ? Pas chez les Sandler visiblement, trop buté pour accepter le changement. « Nous protéger ?! Hugo est à la rue à cause de lui ! » Kenzo lâcha le couteau qui lui servait à éplucher les pommes pour aider sa mère dans la confection d'une tarte, et recula de quelques pas. Il souffrait de l'absence de son frère. Il avait mal de voir sa chaise vide à chaque repas, de ne pas pouvoir se retrouver pour une partie de jeux vidéos, de parler de tout et de rien... Il lui manquait, et le seul responsable était leur père. Qu'on lui trouve des excuses et qu'on en vienne à lui attribuer une quelconque bonne attention à l'égard d'Hugo le peinait. Plus encore, cela faisait naître un certaine forme de colère chez lui... « Chut... S'il te plaît, mon cœur... Ton frère s'en sort très bien, j'en suis persuadée... » Elle le regarda, cherchant un peu de soutien dans ses yeux... En vain. Kenzo lui tourna le dos, écœuré.


Il hésitait... Et s'il s'était trompé ? Et s'il n'habitait pas là finalement ? Kenzo était complètement perdu, se demandant s'il avait bien fait de prendre ce fichu bus. La main tremblotante, il toqua à la porte. L'attente fut, à ses yeux, si longue... Il était même à deux doigts de faire demi-tour. Mais le verrou se fit entendre et la poignée tourna doucement. A la vue de ce visage, le jeune homme soupira de soulagement. « Kenzo ?! Mais... Qu'est-ce qu'il t'est arrivé ? » Hugo se tenait devant lui, appuyé contre la porte. La surprise peinte sur les traits fatigués de son visage, il détaillait son petit frère. Et cet étonnement laissa sa place à l'inquiétude. Car en effet, Kenzo avait une sale mine. La lèvre en sang, l'arcade bien abîmée et un énorme bleu violacé se percevait sur son visage, malgré la pénombre du couloir. « J'ai pris la défense de maman... » commença-t-il par expliquer, en désignant sa bouche coupée. « Puis la tienne... » Son index remonta jusqu'au coquard. Il était salement amoché, et son frère en était choqué. Du plus profond de son cœur, il n'osait pas y croire. Mais un regard échangé avec son petit frère eut suffit pour confirmer ses doutes. L'auteur de ces coups n'était autre que leur père. L'homme tombait petit à petit dans une telle déchéance... Il cherchait à entraîner tout le monde dans sa chute, de les amener avec lui dans un enfer certain. « Entre, ne reste pas là... » Se décalant, Hugo fit signe à Kenzo. Ce dernier baissa la tête, mal de se présenter ainsi à son frère. Il avait besoin d'aide et n'avait pas eut envie de voir une autre personne que son frère. Alors il était venu jusqu'ici, se moquant pas mal de la distance... « Je vais me faire tuer en rentrant... » souffla-t-il, en grimaçant lorsqu'il croisa son reflet dans la miroir du couloir. « Ils ne savent pas que t'es là ? » Kenzo hocha négativement la tête. Après s'être ramassé un dernier coup, il était parti en courant hors de la maison. Puis il avait atterri dans cette gare routière. Un billet dans la poche, il avait eu le besoin de voir son frangin... Regardant autour de lui, il examinait le petit studio new yorkais de son frère. Il donnait l'impression d'être un logement étudiant témoin, avec le strict minimum. « C'est mort, tu ne repars pas. » -lança Hugo en fixant son petit frère, une trousse de soin à la main. « Je ne te laisserais plus. »


« K, tu bouges ton cul ou je dois venir te chercher ?! » La voix de la jeune femme résonna dans toute la salle. Aujourd'hui, ils seraient visiblement seuls pour travailler. Adri' avait envoyer un message à la troupe et n'avait eu de réponse que de la part des Sandler. Ca ne l'étonnait même pas ! Surtout venant de Kenzo, cette tête brûlée acharné de travail ne loupait jamais une occasion de l'embêter. Elle avait même été, pendant un temps, sa victime préférée. « Mmmh, j'adore quand tu me parles comme ça ! Recommence pour voir ? » Le tortionnaire venait de sortir des vestiaires, une bouteille d'eau à la main et une serviette en éponge sur les épaules. Il lui adressa un ravissant sourire, qui promettait un après-midi mouvementé. « Sale gosse ! Allez, on a du boulot ! » Elle riait légèrement, amusée par son comportement. Aujourd'hui, il était devenu son ami. Et ils étaient proche. Elle le protégeait, le motivait et savait que c'était réciproque. Leur relation était différente de ce qu'elle pouvait avoir avec Reggie. Mais elle n'en était pas moins forte. S'avançant vers elle, il laissa de côté ses affaires et se mis en place pour l'échauffement. Il tentait de se concentrer, de se plonger dans une ambiance studieuse, mais elle ne cessait de commenter tout ce qu'il faisait. Ça l'agaçait un peu d'ailleurs. Alors il craqua, et pour qu'elle s'arrête, il l'attrapa par les jambes pour la passer sur son épaule. « Hey ! » Se disant que pour le coup, elle faisait moins la maline, Kenzo se contenta de rire. Adri se débattait, en vain. « Ne nous la casse pas, ok ? » Le capitaine longea le mur, se dirigeant vers les vestiaires. La jeune femme se sentait encore plus idiote, ainsi postée sur l'épaule du petit frère Sandler. « Je ne suis pas en sucre Hugo ! » Ce dernier lui fit un signe, sous entendant qu'elle pouvait donc se débrouiller sans lui pour descendre de là. Et Kenzo, petit malin qu'il était, prenait plaisir à se balader dans la salle, à la faire tourner en rond, et même à lui faire croire qu'elle pesait lourd... « Hugo ? Hugo ! » Décidant qu'il avait assez joué pour cette séance, Kenzo la laissa tomber sur un énorme matelas, en temps normal réservé pour les acrobaties, et se recula rapidement. Il craignait les représailles, et se montrait même prudent à ce sujet. « Bon... ''Allez, on a du boulot !'' » C'était sans doute la réplique à ne pas dire. Surtout pas maintenant. Adriana le fixa, si sérieuse qu'elle en devenait presque impressionnante. « Viens par là toi ! » « Tu me ferais presque peur... » Elle tentait de s'avancer vers lui, mais le jeune homme s'assurait de conserver une distance raisonnable entre eux, afin de ne pas subir les foudres de sa colère. « Viens par là ou je vais parler à la brunette de l'autre jour. » Il arqua les sourcils, peu convaincu par ce qu'elle venait de dire. « Ouais, c'est ça... » Mais Adri' affirmait qu'elle allait rencontrer l'inconnue de la plage. « Je vais lui dire que t'es un pauvre pervers et que tu fantasmes sur elle... » Là, Kenzo ne pu s'empêcher de pâlir légèrement. Il ne riait plus du tout. « Fais ça et... » S'étant avancé vers elle, il avait abaisser sa garde. Si bien que la brunette pu poser son index sur sa bouche et le stopper en pleine phrase. « Chut ! Bosse ! » Au moins, c'était clair !